Une agriculture idéale respectueuse de l’environnement
Ci-dessous, comme évoqué dans son article du 8 décembre 2020, le Pr Bhargava nous offre une solution simple qui répond à la fois aux questions environnementales et économiques, tant pour les agriculteurs et les villageois – c’est-à-dire encore plus de 60% de la population indienne – que pour les citadins dont le nombre augmente à une vitesse exponentielle.
Mais au-delà du contexte indien, peut-être qu’il serait intéressant de voir comment adapter ces mesures agricoles aux différents climats de l’Union Européenne, et notamment ceux de la France. Le recyclage de nos eaux usées/noires urbaines, dans la dynamiques des économies circulaires, offre une variété d’engrais utilisables quels que soient les conditions géographiques des fermes. Climat tempéré, méditerranéen, tropical (Guadeloupe, Martinique, La Réunion) ou (semi)continental (Pologne), dans une exploitation de plusieurs milliers ou centaines d’hectares ou bien de quelques dizaines (fermes de subsistance), voire de quelques hectares seulement (vignobles de grand cru) : les préconisations de Bhargava peuvent être utilisées.
Charge à chacun des territoires locaux d’adapter cet exemple d’économie circulaire en tenant compte des caractéristiques locales.
Bertrand de Foucauld
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À l’heure actuelle, l’utilisation de produits chimiques synthétiques, comme les engrais et les insecticides / pesticides prêts à l’emploi, est devenue très courante pour des rendements agricoles efficaces et supérieurs. Mais les agriculteurs, en particulier en Inde, ne sont pas suffisamment instruits pour se rendre compte de l’importance d’utiliser ces produits chimiques en quantité appropriée. Ils ne prennent pas la peine de respecter les doses correctes ou prescrites car ils n’ont aucune idée des conséquences de l’utilisation de quantités trop élevées. Et certains agriculteurs utilisent intentionnellement des doses plus élevées de ces produits chimiques en espérant obtenir des récoltes exceptionnelles et la destruction totale de tous les insectes / ravageurs sans se rendre compte que contrairement aux humains, les plantes (et les animaux) ne consomment pas au-delà de leurs besoins. Cela entraîne naturellement d’importantes pollutions issues de ces produits chimiques synthétiques et non biodégradables qui sont ensuite emportés dans les rivières et les lacs, ce qui aboutit à polluer et à rendre leurs eaux impropres à la consommation humaine. Les lacs, recevant de tels produits chimiques de synthèse mélangés à des eaux usées, sont voués à une eutrophisation qui finira par entraîner leur mort lente. Cela est déjà arrivé dans une partie du lac Dal (célèbre comme destination touristique) à SriNagar, dans l’État de Jammu-et-Cachemire (maintenant territoire de l’Union) en Inde. Une partie de cet important lac a déjà été convertie en terres marécageuses et en zone constructible.
En fait, en Inde, la situation d’eutrophisation et de pollution de l’eau est devenue réellement désastreuse en raison de la révolution verte préconisée par MS Swaminathan lorsque les agriculteurs ont été invités à utiliser des engrais synthétiques. Les agriculteurs analphabètes ont commencé par mettre trop de produits chimiques, dans le but d’obternir des produits de taille exceptionnelle et un meilleur rendement des cultures, ce qui a entraîné une grave eutrophisation des lacs indiens. Après le Dal, le lac Naini à Nainital a commencé lui aussi à se heurter à de graves problèmes d’eutrophisation.
De facto, presque tous les lacs indiens subissent aujourd’hui de sérieux problèmes d’eutrophisation en raison de cette révolution verte (préconisée par Swaminathan) qui s’avère être plus un fléau qu’un progrès.
La meilleure option est de préparer localement le fumier sur les sites agricoles. Les boues (traitées ou non), obtenues lors du traitement secondaire des eaux usées domestiques (égouts), mélangées ou non à de la terre collectée dans les villages, peuvent être enfouies sous le sol pour être converties en fumier. C’est une bien meilleure option pour les fermiers pour d’obtenir un fumier naturel plus respectueux de l’environnement. Les agriculteurs contribueront volontiers aux frais de transport, vers leurs fermes, de cette terre que le village aura à disposition d’une façon pérenne et économique.
En ce qui concerne les eaux d’irrigation, il est préférable d’utiliser les effluents traités des stations d’épuration des eaux usées domestiques urbaines, disponibles toute l’année. Cela permettra non seulement de compléter les nutriments dans les fermes, mais aussi d’assurer suffisamment d’irrigation tout au long de l’année (même pendant les périodes d’étiage).
De cette manière, les municipalités vont non seulement se débarrasser du problème de l’élimination d’une partie des eaux usées (effluents) et des boues traitées, mais aussi générer des fonds en vendant aux agriculteurs ces boues et effluents traités. Ces fonds couvriront non seulement les frais de transport des boues traitées et des effluents vers les sites d’exploitation, mais également une partie du coût du traitement des eaux usées. Les agriculteurs ne seront que trop heureux de payer de tels coûts car ils économiseront également les frais de pompage pour amener les eaux d’irrigation de régions éloignées ou pour pomper les eaux souterraines vers les fermes. De cette façon, les eaux souterraines ne seront pas non plus épuisées. Et en prime, les rivières / lacs recevront moins d’effluents d’eaux usées polluants.
(Photo de couverture : B. de Foucauld, 14 janvier 2018, Un champ de canne à sucre avec des animaux, village de Sissoli, Utar Pradesh, Inde.)
Trad : BdF.