Réjouissance, ironie et développement durable

La vie révèle quelque fois des ironies savoureuses et offre ainsi des moments de véritable réjouissance. Ainsi, aujourd’hui, j’écoutais un podcast géo-économique, via ma radio-Internet, sur la BBC. Aujourd’hui, le thème portait sur – devinez quoi? – le développement durable, avec un journaliste qui, à partir de données qu’il avait grappillées çà et là, prédisait l’apocalypse, ou même l’enfer (le mot fut plusieurs fois utilisé dans sa forme latine, inferno) pour nos petit-enfants, vers 2100. Bref, nous émettions trop de dioxyde de carbone et trop de particules, nous détruisions trop vite les récifs coralliens, nous mangions trop de viande et il était grand temps de nous mettre au régime écologique, sous peine de nous retrouver dans les flammes de la Géhenne, au sens propre du terme (je pourrai même, comme nous parlons de chaleur, rajouter un h, ce qui donnerait le mot therme issu du grec thermos, c’est-à-dire chaud). Et puisque nous parlons de bain public, le journaliste nous prévoyait également, d’ici la fin du siècle, une montée des eaux de cinquante mètres! Cela me fait frémir, surtout quand je pense que les écoles primaires ne donnent plus de cours de natation…

Bien alarmé par ces prévisions apocalyptiques, je décidai d’écouter la publicité que la BBC met, depuis plusieurs semaines, en début de ses émissions sous format de podcasts adapté au radios wifi : grâce à cette excellente station radiophonique, la BBC, je vécus un véritable bonheur ironique : la publicité, destinée à une audience française, promouvait la classe affaires d’une grosse compagnie aérienne franco-néerlandaise. Quoi, pendant une demi-heure, on nous annonce le feu du ciel –  le réchauffement climatique – on nous promet, après l’enseignement aujourd’hui d’une prof de psycho spécialisée dans le développement durable, celui, demain, d’une prof de morale (si, si, vous avez bien lu), juste après nous avoir encouragé à prendre l’avion en classe business!

Je remercie encore une fois la BBC de m’avoir permis de littéralement déguster ce moment de rare contradiction, d’antinomie aussi évidente ou, en d’autre mots, de paradoxe aussi éclatant, tel un feu d’artifice, dans nos cieux de plus en plus enflammés.

Alors, bien sûr, ne me faîtes pas dire ce que je n’ai pas dit! Oui, nous assistons à un changement climatique, et probablement accéléré. Oui, sur un période de plusieurs décennies, les courbes moyennes de température de Marseille sont devenues celles de Lyon. Oui, Nancy bénéficiais de plusieurs semaines d’enneigement dans les années 1950 alors qu’aujourd’hui, c’est bien le bout du monde s’il neige, en cumulé, une semaine par an. Oui, la Mer de Glace risque bien de se transformer en mer tout court. En même temps, à l’époque des dinosaures, le taux de CO2 dans l’air était trois fois plus élevé qu’aujourd’hui et le territoire de l’Ile-de-France vivait sous un climat tropical.  Lors de la dernière glaciation, qui s’est terminée vers -20.000 av J.C., les glaciers alpins allaient jusqu’à Lyon. Or à cette époque l’industrie était encore peu développée. Plus récemment, je rappelle que Groënland signifie Terre Verte et non pas Terre Glacée. Enfin, il serait intéressant combien de tonnes de CO2 auront été émis pour organiser ce sommet des Nations Unies.

Des pistes de solution résident dans les nouvelles technologies énergétiques, telles que la fusion nucléaire, l’éolien et le solaire (dans le respect de l’aménagement du territoire terrestre ou maritime) et, peut-être, dans la façon de montrer sa réussite sociale. Tant que nos chefs d’Etat ou nos PDG utiliseront, pour leur besoins personnels, des jumbo-jets, ou, pour les plus modestes, des avions d’affaires, à partir des aéroports d’Orly, du Bourget ou de Vélizy-Villacoublay, la dynamique donnée par nos élites sera celle de la corrélation entre l’émission de gaz à effet de serre et celle de l’ascension sociale[1]à nuancer toutefois : les émissions de CO2 par le trafic aérien mondial sont de l’ordre de 3% des GES totaux en 2014 mais ce pourcentage pourrait augmenté avec le très fort développement de la flotte aérienne commerciale dans le monde. Peut-être pourrions-nous rêver que la génération suivante axe plus son bonheur sur l’être que sur l’avoir, plus sur être heureux qu’avoir du plaisir, qu’être en relation avec ses proches qu’avoir des likes sur les réseaux sociaux[2]qui peuvent être bien utiles par ailleurs.

Références[+]