Macron/Al-Sissi : “Armes/compromission” ou le choix de “Vivre ensemble et libres”?
Lundi 13 décembre, quand j’ai entendu la nouvelle selon laquelle notre président allait remettre la Légion d’Honneur au dictateur égyptien, je me suis immédiatement interrogé sur le sens de cette démarche. Selon un historien spécialiste de l’Egypte, « il y a eu un tournant dans la politique étrangère française, depuis le mandat de François Hollande. La France a accepté de mettre de côté les questions de droits de l’homme au nom de l’impératif sécuritaire. » (La Croix, 14/12/2020).
Avec évidemment, la vente d’armes en arrière-plan : on n’en parle peu en public mais il faut absolument écouler nos stocks d’armement classique (cf : Nexter, ex-GIAT), quitte à vendre à perte. Malgré les interdictions de l’U.E, malgré le fait que les véhicules Sherpa et MIDS (Renault Defense) soient en fait utilisés pour la répression contre la population civile, Emmanuel Macron déploie le tapis rouge pour le dictateur, qui compte 60.000 prisonniers politiques dans ses geôles et, cerise sur le gâteau, fait poser “la première pierre” d’un bâtiment au sein de la Cité Internationale (Paris 14e) dont l’esprit est aussi éloigné que l’on peut de toute forme de dictature. En effet, ce campus fut construit en 1920, après la destruction d’une structure militaire – les fortifications et la “zone” – dans une dynamique pacifique, au sein d’une Europe traumatisée par la 1ère guerre mondiale. Le député humaniste André Honorat y joua un rôle majeur.
Est-ce que la répression politique et sociale est efficace? Est-ce que l’enfermement arbitraire de prisonniers, y compris de mouvance islamiste, est la bonne réponse? Je pose la question en me gardant bien, toutefois, d’y répondre. Pourtant, mon expérience de travailleur social dans les quartiers pauvres de la région parisienne ou londonienne, ou même, dans une moindre mesure, new-yorkaise, m’ont démontré que la croissance économique et démocratique étaient efficaces pour réhabiliter les quartiers en souffrance des grandes zones urbaines. Plutôt que de véhicules blindés et de systèmes électroniques de contrôle des populations, est-ce que la France, dans l’esprit de l’Union Européenne, ne pourraient pas vendre des logiciels éducatifs et de l’expertise en ingénierie civile, tout en proposant un partenariat avec l’Egypte non plus basé sur le chantage armes/compromission mais plutôt sur l’élaboration de chantiers incorporant les différents acteurs de cette tragédies : membres du gouvernement d’Al-Sissi et de Macron, mais aussi associations de citoyens égyptiens et français sans oublier des universitaires et des journalistes?
Peut-être que des lecteurs du site vont me traiter de “rêveur” : ils auront probablement raison. Toutefois, mon expérience sur le terrain, avec beaucoup de familles de différentes religions et cultures, m’a appris “qu’un meilleur” est possible et nécessaire. Regardons vers cet horizon qui, même – ou parce que ? – s’il est toujours perfectible, donne le sens premier de nos lieux de vie : vivre ensemble.
Bibliographie
https://www.lepoint.fr/societe/sissi-et-macron-attendus-sur-les-droits-de-l-homme-en-egypte-07-12-2020-2404518_23.php
https://fr.wikipedia.org/wiki/Nexter
https://www.amnesty.fr/controle-des-armes/actualites/vente-darmes-francaises-a-legypte-business-as-usual
https://www.la-croix.com/Monde/Afrique/rapport-denonce-ventes-darmes-francaises-lEgypte-2018-07-02-1200951696
https://www.ciup.fr/1925-1938/la-genese-de-la-cite-42971/
la legion d’honneur c’est une compensation les presidents egyptiens finissent mal en general
Joli message de Bertrand au moment de Noël et qui nous permet de mieux connaître son parcours et sa sensibilité.
Merci pour cette réflexion instructive et sage…