HATVP, Delevoye et Griset : une décision-pivot mais du travail reste à faire!

En l’espace de sept jours, un haut-commissaire et un ministre ont été condamnés pour avoir fait de fausses déclarations à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Le haut-commissaire aux retraites, Jean-Paul Delevoye, avait comparu dans le cadre d’une reconnaissance préalable de culpabilité et a écopé de quatre mois de prison avec sursis et 15.000 euros d’amende pour ne pas avoir déclaré plusieurs mandats (Le Figaro et AFP, le 2 décembre 2021). Le ministre délégué aux PME, Alain Griset, a quant à lui, fait appel de la sentence : la Cour a condamné ce dernier à six mois de prison et une peine d’inéligibilité de trois ans, les deux peines à l’encontre du ministre étant assorties du sursis. Le Tribunal a reproché à ce membre du gouvernement Macron d’avoir fait le choix de dissimuler une partie substantielle de son patrimoine (BFM TV, le 8 décembre 2021).

Dans les deux cas, les deux personnages publics avaient plaidé l’erreur ou la maladresse ou encore être victime d’un mauvais conseil.

Ces deux décisions marquent une véritable progression et une date charnière dans le domaine de la transparence des élus et hauts fonctionnaires.

Pour autant un gros travail reste à faire : si l’on constate un mieux dans le travail de la Haute autorité, plusieurs questions restent en suspens. En effet, pourquoi l’institution semble-t-elle se concentrer uniquement sur les organes nationaux? La loi du 11 octobre 2013 précise pourtant bien que les élus régionaux et départementaux doivent également faire leurs déclarations d’intérêts et de patrimoine. Même les maires de villes dont la population est supérieure à 20.000 habitants sont soumis à cette obligation.

Pourtant, une fois que l’on a lu la loi et que l’on regarde le terrain, la réalité factuelle apparaît tout autre. Pendant cinq ans, une élue locale, Marie-Hélène Aubert, avait déclaré 484 € de revenus mensuels, c’est-à-dire uniquement sa rémunération comme maire-adjointe. Pourtant,  dès 2011, elle occupait un poste de conseillère départementale puis de vice-présidente du département des Yvelines en 2015.

Enfin, en 2020, MH Aubert était devenue maire de la petite ville de Jouy-en-Josas et vice-présidente de la communauté d’agglomération de Versailles-Grand-Parc. L’ensemble des rémunérations liées à ces mandats cumulait à 6400 € net par mois. Après la publication de plusieurs articles de contrib.city, l’édile avait modifié ses déclarations mais ces dernières restaient sous-évaluées.

L’élue avait également largement sous-estimé son patrimoine immobilier dans sa déclaration à la Haute autorité.

Par ailleurs, la déclaration initiale de l’élue, datée du 23 mai 2015, a disparu de son compte HATVP. CC ignore la raison du retrait de cette déclaration. Une hypothèse : a-t-elle été retirée du fait qu’elle était largement incomplète? Depuis, MH Aubert aura déposé pas moins de cinq déclarations différentes. Les quatre premières[1]Dates de publication : 23 mai 2015, 4 septembre 2020, 8 novembre 2020 et 29 novembre 2020 sont toutes fausses. A ce sujet, la quatrième indique, chose étonnante, que Marie-Hélène Aubert n’a plus aucune rémunération publique (pourtant elle sort d’un voyage officiel en Afrique de l’ouest, dans le cadre de la politique extérieure du Conseil départemental des Yvelines).

Espérons que la cinquième version (la HATVP a indiqué : Déclaration déposée – Publication à venir) se rapprochera de la réalité.

Toujours est-il que, malgré les différents articles de votre site d’information, malgré le fait que plusieurs autorités ont été prévenues par des habitants de Jouy-en-Josas scandalisés par ce manque de transparence, et enfin malgré un procès pour diffamation dans lequel les fausses déclarations ont été avouées par la même élue (elle avait déclaré avoir fait une erreur), rien n’a bougé.

Si encore le cas de Marie-Hélène Aubert était isolé dans les Yvelines ou même en France, la perspective serait différente. Mais comme CC l’avait démontré dans ses articles des 25 février 2020  et 17 mars 2021, la liste est longue! A titre de rappel, les collectivités locales dépensent 200 milliards d’euros chaque année : cela mérite tout de même un peu plus de transparence de la part de certains élus locaux, notamment au vu de chantiers surdimensionnés[2]Le Canard enchaîné du 01/12/2021, Les communes voient grand et se se noient ou dont l’utilité publique – à défaut de coûts parfois exorbitants – pose question.

Déclaration de Marie-Hélène Aubert à la HATVP au 9 décembre 2021. On remarquera que l’élue en est à sa cinquième modification (la première a été supprimée du site). Toutes ses déclarations publiées jusqu’à maintenant ont été (très) incomplètes.

 

 

 

Références[+]

Une réflexion sur “HATVP, Delevoye et Griset : une décision-pivot mais du travail reste à faire!

  • 11 décembre 2021 à 8 h 54 min
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    Un lecteur de Contrib’City m’a envoyé ce message. Trouvant ce dernier tout à fait pertinent, je lui ai demandé l’autorisation de le publier, ce qu’il a accepté.

    “On comprend mieux – par ces révélations successives, sans parler de quelques autres dont s’emparent les médias – pourquoi en Inde l’adepte de la quête spirituelle doit s’éloigner du sexe, de l’argent et de la politique.

    Bon courage avec votre compteur Geiger éthique.”

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